Le « septième continent », ce vortex de plastique qui défigure nos océans

Homme au bord de la mer tenant un sac rempli de bouteilles en plastique.

Découvert à la fin des années 1990 par l’océanographe Charles J. Moore, le « Great Pacific Garbage Patch », surnommé « septième continent », est devenu le symbole d’un désastre environnemental mondial. Ce vortex de déchets, composé principalement de plastique, s’étend désormais sur plus de 1,6 million de kilomètres carrés, soit trois fois la superficie de la France. Situé au nord de l’océan Pacifique, il concentre des milliards de fragments issus de notre consommation quotidienne : sacs, bouteilles, emballages, cordages, tous piégés par les courants marins.

Le phénomène ne date pas d’hier. Dès les années soixante, la production mondiale de plastique s’est envolée. En quarante ans, le volume de micro-déchets a été multiplié par cent. Chaque année, environ 300 millions de tonnes de plastique sont produites, dont une fraction échappe à tout contrôle pour finir dans les océans. Le résultat ? Cinq gyres océaniques ont vu le jour sur la planète, véritables pièges à plastique tournoyant au gré des courants. Celui du Pacifique Nord reste le plus étendu, avec environ 80 000 tonnes de plastique flottant à sa surface. Le point sur le sujet avec Jean Fixot de Chimirec !

Des conséquences dramatiques sur la biodiversité

L’accumulation de plastique dans les océans n’est pas qu’un problème esthétique, elle constitue une menace directe pour la faune marine. Les déchets flottants sont souvent confondus avec des proies par les animaux. Des oiseaux marins ingèrent ainsi des fragments de plastique, parfois en quantité alarmante. En Australie, un seul oiseau autopsié contenait 234 morceaux de plastique. D’après les estimations les plus sérieuses, cette pollution causerait la mort d’un million d’oiseaux et de cent mille mammifères marins chaque année.

Mais l’impact est plus insidieux encore. Les microplastiques, invisibles à l’œil nu, s’infiltrent dans la chaîne alimentaire. En parallèle, ces amas flottants deviennent le véhicule involontaire d’espèces invasives, perturbant les écosystèmes locaux. Les plaques de déchets diffusent également des polluants chimiques dans l’eau, avec des effets encore mal connus sur le long terme.

Dix ans pour nettoyer, ou tout changer ?

Face à l’ampleur du désastre, plusieurs initiatives voient le jour. Des campagnes de récupération de déchets ont été menées dans différentes zones contaminées, notamment autour d’Hawaï. Certaines entreprises ont même tenté de transformer les déchets récoltés en nouveaux produits, illustrant une volonté d’économie circulaire.

En 2018, un projet de nettoyage à grande échelle du vortex du Pacifique a été lancé, reposant sur un système de barrières flottantes en forme de fer à cheval. Les débuts ont été décevants, mais les concepteurs ne renoncent pas. En 2024, ils ont affirmé que l’élimination du continent de plastique était techniquement réalisable d’ici dix ans, pour un coût avoisinant 7,5 milliards de dollars. Une ambition colossale, à la hauteur de l’enjeu.

Réduire l’usage du plastique à la source

Malgré l’enthousiasme que suscitent ces opérations de nettoyage, les scientifiques et les défenseurs de l’environnement s’accordent sur un point : il faut impérativement réduire la production de plastique à usage unique. Chaque année, 500 milliards de sacs plastiques sont consommés dans le monde. Aux États-Unis, ce sont 35 milliards de bouteilles en plastique qui sont jetées. Ce modèle n’est plus soutenable.

Limiter l’usage des plastiques jetables, améliorer les systèmes de collecte et de traitement des déchets, promouvoir des matériaux biodégradables : voilà les véritables leviers d’action pour enrayer la prolifération de ces vortex. Le défi est mondial. Il nécessite une coordination internationale, des politiques publiques ambitieuses et une évolution des comportements individuels.

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